Retraite 2005 organisée à Avajan, par
les Amis de la Part Dieu. 05 56 48 22 10
Avec le P. Collas Le Christ. II LINVISIBLE QUE DANS LE CHRIST ON A POURTANT PU VOIR. Dieu est ce « Dieu invisible » quil faut pourtant saccoutumer à voir. Dieu que je ne peux pas voir, alors quil est pourtant à portée de mes mains. Cette méditation tient entre deux textes bibliques. Le premier rapporte une demande étrange que Moïse fit à Dieu. Le second, une parole venue des actes des Apôtres. Moïse dans le désert trouve le temps si long et le peuple si lourd, quil demande au Seigneur de se montrer. Et il sentend répondre : « Je vais passer devant toi. Mais quand je passerai, je mettrai ma main devant tes yeux. Et lorsque je serai passé, tu me verras de dos. Car ma gloire, nul ne peut la voir. » Et les Apôtres, après la mort de Jésus. Ils viennent dêtre arrêtés parce quils parlent trop du Christ. Pierre et les autres, en effet, ne considèrent pas que son histoire se soit achevée au matin de sa résurrection. Et donc, dans la rue et au Temple ils parlent du Christ, au point que le Sanhédrin, lassé par ces discours intempestifs, donne lordre de les arrêter. On les flagelle et on leur intime lordre de ne plus parler de Jésus. A quoi Pierre, au nom des autres, répond : « Nous, nous ne pouvons pas ne pas parler. » Ils partent, parlent. Et en mourront. Le Dieu invisible. Pourquoi Dieu nest-il pas visible alors que notre vie qui est suspendue à lui est si lourde ? Parce quil veut savoir si jai la foi ? Cette hypothèse est inadmissible, pour la raison très simple que Dieu na pas besoin de nous mettre à lépreuve pour savoir ce quil y a dans notre cur, puisquil y lit en direct. Et puis, que Dieu se cache, alors quil sait combien ce jeu peut produire dangoisse en nous, serait cruel de sa part, alors que lEvangile de son Fils nous dit tant quil est tendresse. Je préfère croire que Dieu ne se cache pas. Et que ce que nous appelons son invisibilité nest pas un calcul de sa part, puisque son désir est dêtre aimé. Et vu. Et quil le désire parce quil est Père et Mère, et quil veut donc vivre à portée de nos mains et de nos yeux, et quil lui faut, à lui aussi, passer par là pour joindre notre coeur. Mais alors, comment se fait-il que puisquil est désireux de se montrer et que nous sommes faits pour le voir, nous ne puissions pourtant rien voir de lui ? Il respecte
notre nature. Imaginez que vous sortiez dune pièce noire et que vous soyez projeté en plein soleil. Vous tâtonnez un moment, avant de discerner où vous êtes et qui se trouve autour de vous. De même nous ne pouvons pas passer de la cécité quétait la non-existence doù lamour de nos parents nous a tirés, à la pleine lumière qui règne dans le Pays de Dieu, sans franchir cette série de sas en quoi consiste une vie dhomme, pour nous accoutumer peu à peu à sa lumière. Nous sortons de la non-lumière quest la non-existence et il faut nous accoutumer au soleil de Dieu. Nous nétions pas aimés, puisque nous nexistions pas, et nous voilà projetés dans la tendresse. Personne ne nous connaissait, et voilà que quelquun nous sourit et nous appelle par un nom que nous navons encore jamais porté. Ainsi dAdam et dEve : les tout premiers vivants étaient aveugles comme le seront les suivants et pour la même raison. Cest même pour cela quils se sont empêtrés dans ce quon a appelé le péché originel. Non pas aveugles, mais aveuglés, de naissance, comme nous, et pourtant, comme nous aussi, faits pour voir. Et devant shabituer à être vus et à être aimés. La vie, cest pour cela quelle nous est donnée. Toute une vie
pour apprendre à voir Dieu. Cest quil faut toute une vie pour admettre que ne pas voir le Visage de Dieu mais celui des hommes, nous prépare à voir Dieu au dernier jour. Toute une histoire qui dure déjà depuis des milliers dannées, dans laquelle chaque vivant prend pied et où, plus ou moins longtemps selon son propre cursus, il cherche le visage au travers de son quotidien ; et profite aussi de ce que chacun de ses frères vit pour son propre compte et au profit de tous. Vivre en homme cest se préparer à voir Dieu. Si nous ne voyons pas Dieu tout de suite, cest donc parce quil faut toute une vie pour nous accoutumer à le voir. Cest parce quil nous faut du temps pour apprendre à aimer. Pour apprendre à laimer. Cest aussi parce quil faut que chaque homme expérimente à sa manière à lui ce que cest, pour un homme, que dêtre aimé par un Dieu. Toute une vie pour cela. Toute une vie pour que notre corps et notre cur se rodent à la lumière et à lamour, shabituent à voir et à être aimés. La vie nest pas un temps dépreuve où Dieu nous surveillerait pour voir comment nous nous comportons. Cest un temps de patience durant lequel le Père doit attendre que nos yeux saccoutument à Lui, et un temps de tâtonnements où nous tendons les mains et où nos mains peu à peu se rapprochent du visage cherché. Un temps daccoutumance durant lequel nous qui navions jusque là jamais existé, expérimentons à petites doses ce quest la vie : la vie sur terre, dans la lumière tamisée, en vue de la vie dans la Gloire les yeux fixés sur le Visage du Père, et fixés sur lui sans ciller. Grâce
au Christ, nous lavons vu. Des certitudes sur ce Christ dans la stature de qui Dieu sest rendu visible. Dieu qui se faufile, pour ne pas risquer de nous effaroucher, sous le visage dun homme, Jésus, face auquel, pendant près de quatre ans, des hommes se tiendront. Un homme dont les yeux avaient la couleur des yeux de Dieu et dont on pouvait pourtant, soutenir le regard. Un homme qui sest dabord présenté comme un petit enfant. Quon a vu grandir comme nimporte quel fils dhomme. Quon a entendu parler comme nimporte quel voisin. Mais dont les paroles toute simples débordaient de sens au point que, vingt siècles après quil soit venu les prononcer, on les médite encore. Le Christ, conjonction dun double désir : celui du Père de se laisser pressentir, et celui des hommes de Le toucher du doigt. Le Christ, venu, non pas comme nous le dirons bientôt, pour nous sauver de la mort, mais pour nous sourire de la part de son Père et pour nous dire que nous aussi nous étions ses fils, en termes si clairs et si simples, quaujourdhui, nous voici rassemblés pour les laisser résonner en nous comme jadis les Apôtres, et comme tout au long des vingt derniers siècles dautres frères, sans nombre, lont fait. Le
Christ en qui le Père se fait si proche que nous navons
même pas besoin de tendre la main pour le toucher. Pour toucher
le visage de Dieu ! Si nous sommes là aujourdhui, cest
pour lui laisser le temps de nous parler encore et de nous dire à
nouveau la seule chose quil ait à nous dire, dont nous
ayons besoin et quil nous faille entendre : que, même si
nous ne pouvons pas voir le Père et si nous navons pu que
le deviner sous ses traits à lui, le Fils, nous sommes les fils
bien-aimés de son Père, au même titre quil
lest lui aussi, et de toute éternité. Et nous le
croyons parce quil a été et restera le messager
du Père, sa visibilisation. Car, « qui ma vu a vu
le Père. »
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