Retraite 2005 organisée à Avajan, par les Amis de la Part Dieu. 05 56 48 22 10

Avec le P. Collas
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Le Christ.

III LE DIEU QUI FAIT ALLIANCE.


Sans doute aurions-nous pressenti l’existence d’un Dieu, même si ce Dieu ne nous avait pas fait signe : la beauté de la création en appelle forcément à une source qui soit au moins à la hauteur de cette beauté. Mais, parce que les hommes, nous venons de le dire, ont un besoin inaliénable de le voir, il leur a maintes fois fait signe, et il s’est Lui-même exprimé. Or, les hommes, en fonction de leur culture et de leur histoire ont tenté de creuser et de transmettre à leurs contemporains et à leurs descendants, quelque chose de ce qu’au long des siècles, ils ont pensé comprendre du Dieu qui fit leur monde. Les Religions sont nées de ce besoin d’établir un contact avec Dieu et de redire ensuite ce qu’elles ont compris de ce qu’il a pu leur dire.

Le Christ, fils du Père, comme nous.
Le Christianisme est allé loin dans sa découverte, puisqu’il a été fait porteur d’une nouvelle explosive : il a dit que Dieu, comme s’il voulait nous parler à l’oreille, avait envoyé son Fils chez nous pour que, sa bouche étant désormais au raz de nos visages, nos oreilles, puissent enregistrer en mots humains le langage de l’Eternel : son Fils est venu lui-même nous parler en son Nom, et nous traduire doucement, pour ne pas nous effaroucher, les mots du Père. Ses paroles ont paru à ses apôtres, et à nous aussi aujourd’hui, aussi maladroites que les nôtres, conditionnées qu’elles étaient par la pauvreté des mots des hommes auxquels le Fils s’était réduit ; et pourtant son message est passé et tient toujours : Dieu son Père est aussi notre Père.

Or, que nous a dit le Fils, de la part du Père ? Que le monde ne doit son existence qu’au désir de Dieu de ne pas rester seul à apprécier sa joie ; et donc d’appeler à la vie ce qui n’existait pas, pour que « cela » devienne des fils pour lui. Des fils avec lesquels il puisse faire alliance. Et de fait, la Bible nous parle du Dieu qui fait alliance ; en d’autres termes, un Dieu qui s’ingénie à se lier. D’ailleurs, le mot ‘religion’ porte en lui-même le sens et les gestes de l’alliance, la charge de la religion étant de relier l’homme à ce Dieu qui se penche vers lui. C’est l’homme d’ailleurs, qui a lui-même inventé les religions tant son désir, animé, sans qu’il le sache par celui de Dieu, était fort de toucher du doigt, au tout au moins, du cœur, le Personnage qui lui donnait la vie, mais de le toucher jusqu’à ne plus le lâcher. De se laisser lier à lui au point de devenir l’inséparable de Dieu. Le seul fait que les religions existent est le signe, non seulement du désir de Dieu de se faire connaître, mais aussi du besoin qu’a l’homme de se lier à lui. Le rôle essentiel de la religion n’est, en définitive, que de signifier cette alliance et de lui donner corps.

Le système de l’alliance.
Si l’idée d’alliance est en effet le noyau dur du message de Dieu, elle se traduit, avant même la venue de l’homme, dans la structure de l’univers. Bien sûr, nous trouvons des traces de cette alliance dans les religions. Mais pouvons-nous dire qu’il s’en trouve aussi dans la structure même du cosmos ? Peut-on penser que cette alliance qui semble être son idée fixe, soit tellement fondamentale pour Dieu qu’elle soit antérieure à toute religion, et donc à toute relation consciente de l’homme avec Lui, et que l’univers lui-même se soit construit dans un style d’alliance, mettant comme règle de base de l’évolution qui allait le produire, l’impossibilité de la solitude ou de l’isolement ? De sorte que rien ne puisse fonctionner et croître que dans ce style-là ? Au point que cette alliance serait inscrite dans les gênes mêmes du vivant et bien avant que l’homme n’apparaisse ?

Ces questions ne sont plus des questions, aujourd’hui. Nous savons en effet, que le big-bang, en libérant de la pression insurmontable dans laquelle ils étaient maintenus, les éléments qui constitueraient l’univers, leur a permis de prendre leur élan vers l’ ‘autre’ afin d’établir avec lui un partenariat. C’est de cet élan que la vie est sortie. A la base de l’existence s’est trouvé le besoin de rejoindre et de s’allier. C’est donc d’abord à ce niveau radical qu’on a vu se réaliser l’idée fixe de Dieu qu’est l’alliance.

Si l’alliance, aujourd’hui, nous paraît être le noyau du message dont il a chargé son Fils, c’est parce que l’alliance est aussi le secret de sa propre technique. Ainsi, les particules qui, jadis, étaient coincées et qui n’avaient pu, de ce fait, choisir aucune alliance, dès qu’elles sont libérées, se mettent à la recherche d’un partenaire et dès qu’il est trouvé, il y a vie. La vie ne vit qu’à base d’alliance. Un jour, sur une de ces étincelles refroidies, la conscience est apparue. Il aura fallu, bien sûr, une infinité d’alliances pour que ces alliances finissent par savoir qu’elles sont alliées : le jour où elles l’ont su, la conscience est apparue. Ce que Dieu voulait.

L’amour, le nom le plus profond de l’alliance.
Maintenant que la conscience a pris le relais de l’inconscient, on retrouve la même loi fondamentale. Seulement, parce qu’elle est consciente, cette loi sait ce qu’elle est, et à l’alliance qui l’a faite, la conscience a donné un nom et c’est l’amour. L’amour est la loi de base de la nature, mais devenue consciente, et dont l’homme accepte d’accomplir le jeu. Sur le plan personnel, mais aussi sur le plan collectif, car les nations elles-mêmes travaillent à s’unir. Je me dis que si ce besoin d’alliance a franchi les différents niveaux de la conscientisation et tous les moments de l’histoire, et même s’il se cache sous d’autres idées que celles proposées par les religions, c’est que ce besoin de s’allier correspond bien à la loi fondatrice de la vie. Ce que nous disions tout à l’heure, que le Dieu dont nous parle les religions est essentiellement un Dieu d’alliance, se traduit forcément dans sa créature, et la meilleure manière pour un être humain de jouer le jeu de ce Dieu-là, c’est de s’allier.

Les religions ont donc raison de parler d’alliance. La Bible, en premier, nous avait raconté comment le Peuple hébreu, autant qu’il le pouvait alors, avait pris conscience de cette structure de base de la vie, lorsqu’il a découvert que Dieu était son allié et que tout sur terre, comme son Dieu, fonctionnait à base d’alliance. C’est cette certitude dont les chrétiens ont hérité. Et c‘est pourquoi ils enseignent eux aussi que tous les vivants sont des alliés de Dieu.

Une seule alliance.
Le peuple juif parlait de plusieurs alliances, mais en réalité, si on y regarde de près, il n’y en eut jamais qu’une. Celle dont Jésus nous parle et que nous avons l’habitude de nommer la nouvelle Alliance, serait mieux nommée l’« Alliance maintenue ». Dieu n’a fait qu’une alliance avec l’humanité lorsqu’il a dit : « Faisons l’homme à notre image ». Au rythme même de l’Evolution, cette alliance est parvenue peu à peu à la conscience ; elle a franchi des étapes, mais elle est toujours la même. Il faut nous sortir de la tête, cette idée selon laquelle Dieu ayant manqué la première, a dû la refaire. Le Christ n’est pas le réparateur qui viendrait jeter aux orties un passé raté. Seulement, l’alliance est évolutive, comme la vie qu’elle produit. Et il faut toute une vie pour découvrir que l’univers et l’homme sont les alliés de Dieu.

L’alliance première est donc la seule, et c’est l’Alliance avec Noë. Vous connaissez l’histoire : le monde va mal, le déluge le détruit ; mais Dieu revient et éclaire les nuages de son Arc en ciel, signe que jamais plus il ne se fâchera. C’est la première manifestation, maladroite, certes, mais claire, de l’alliance : elle était tellement solide que même la mise à mort du Fils, ne l’a pas dissoute. Son Alliance, comme lui, est éternelle : quelles que soient les circonstances qu’il lui faudrait traverser, Dieu s’en était porté garant. Moïse ne la renouvellera pas : il la gravera simplement sur la pierre pour en faire le texte de la Loi. Quant à Jésus, il la portera à l’incandescence, dans les Béatitudes. Il confirmera sa fiabilité en montrant que même sa mort, décidée par les Princes des Prêtres, ne l’avait pas rompue. En fait, rien ne peut rien contre elle car, inscrite au cœur de Dieu, elle est aussi inscrite dans nos gênes. J’aime cette habitude, qui consistait, pour les Juifs, à porter des rouleaux de la Loi sur leur front. Symbolique et beau : sur nos fronts, comme dans nos gênes, le signe de l’alliance !

Le travail d’alliance n’est pas achevé. Nous continuons de le tisser aujourd’hui : la loi de base qui, pour une particule, consiste à s’allier à une autre pour donner la vie, culmine dans l’Incarnation où le divin s’allie à l’humain, et elle fonctionnera jusqu’à la fin des temps. Ce qui était visé dès l’origine c’est que l’alliance des particules donne la matière et puis la vie intelligente, et qu’ainsi le cœur de Dieu puisse s’allier à travers la matière, à l’intelligence et au cœur de l’homme qui en viendrait. Désormais nous savons que, bien plus qu’un bien être humain, ce qui était visé dans l’alliance que Dieu tissait avec l’homme, c’était la divinisation de l’homme.

Alliance et communion.
L’idée de la communion, autre nom de l’alliance, entre la divinité et l’humain, bien qu’exprimée différemment en fonction des cultures, se retrouve dans toutes les religions, et elle est le moteur essentiel du cheminement de la vie. Une communion qui n’est évidemment pas une fusion, mais l’exaltation au maximum de la richesse originale de chacun des vivants qui se rencontrent et la soudure inaltérable à laquelle ils parviennent.

Et c’est là qu’on reconnaît l’amour de Dieu. Faire alliance avec quelque chose qui n’existe pas jusqu’à ce que « ça » existe. Et poursuivre ensuite l’alliance jusqu’à faire que ce qui existe devienne conscient d’exister, pour pouvoir enfin lui dire : « Je t’aime » ; le dire avec tant d’amour qu’on parvienne à déclencher l’acquiescement de l’autre, telle est l’Alliance conclue entre Dieu et les hommes. Que Jésus nous a révélée.

La plus forte image que nous puissions donc avoir de l’Alliance dont Dieu est l’Inventeur et la source, se trouve dans la personne même de Jésus. Jésus qui a dit aux Apôtres ébahis que « nul ne peut aller au Père sans passer par moi. » (Jn.14,6) : par lui, comme une rive fait alliance avec l’autre bord, par un pont, pour qu’ ‘ici’ puisse aller jusque ‘là-bas’. Si nul ne peut rejoindre le Père sans passer par le Christ, c’est tout bonnement parce que Jésus est à la fois sur une rive et sur l’autre, et qu’il tient en un seul baiser, la main du Père et la nôtre. Et que le lien qui le tient au Père et à nous, est prêt à surmonter toutes les tensions. Prêt à tenir, même sous la mort et sous les coups de boutoir de la croix. Que Jésus n’ait pas lâché prise sous les sarcasmes des Princes des Prêtres, sous l’incompréhension de quelques-uns de ses contemporains, sous la désespérance de ses disciples et sous leur abandon, et que même sous la mort, il soit resté plus fort qu’elle et vivant sans retour, tout cela prouve que son lien au Père et avec nous est une alliance plus forte que le mal et que la mort.

L’ardeur passionnée avec laquelle Il se tend à la fois vers son Père et vers nous, est la révélation de l’idée fixe et du génie de Dieu : faire que tout ne fasse qu’un. La dernière image qu’il nous a laissée du secret du Père, c’est au jour de sa résurrection que nous l’avons trouvée : le lien qui le lie à son Père et à l’Esprit est d’une telle force qu’il l’arrache à la mort et le propulse au plus profond des cieux. En définitive, le Christ nous révèle que Dieu s’est allié à nous et à l’histoire pour que ce qui n’existait pas devienne Dieu.


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