Retraite 2005 organisée à Avajan, par
les Amis de la Part Dieu. 05 56 48 22 10
Avec le P. Collas Le Christ. VI CEUX QUI CROIENT ET CEUX QUI NE CROIENT PAS AU CHRIST.
Sans abandonner le moins du monde le thème de cette retraite mais pour vous reposer, je vais vous emmener avec moi au sommet du Pic de Néouvielle. Nous avons traversé deux torrents. Nous nous sommes agrippés à des rochers de granit rose : un peu dappréhension, parfois : certains sont si gros que nous ne sommes que des fourmis sur leurs flancs. Plus ils se sont prêtés à notre ascension, plus le fond de la vallée nous a semblé fluet. Pas mal de sueur, sans doute pas mal aussi de frissons. Pas loin de quatre heures de montée, et nous voici au sommet. Pas un brin dherbe, pas un arbre, bien sûr ; du granit rose, simplement. Une impression de fantastique solidité. Face à nous, loin, le cirque de Gavarnie, rapetissé par la distance. Le Vignemale. A notre gauche et (presque) à portée de la main, le Ramougne. Sur sa gauche, le pic Long. A ses pieds, et seulement mille mètres au dessous de nous, le lac de Capdelong. A gauche encore, plus bas, les cordées qui se traînent. Les lacs dAuber et dAumar, bijoux de cristal bleu. Surplombant tout de loin, de bien loin, le pic du Midi, et son observatoire. Tout cela petit en diable, face aux rochers sur lesquels, pour linstant et en attendant de redescendre, nous triomphons. Chacun voit ce
que je viens de dire. Mais chacun le voit à sa façon.
A les entendre, dailleurs, nous avons vu différemment les
mêmes choses. Et pourtant, tout à lheure, quand nous
redescendrons, rompus mais exaltés, nous serons tous daccord
pour dire que nous sommes dépassés par la beauté
de ce qui vient de nous être offert. Et ce soir, autour de la
table, chacun racontera à sa manière ce quil a vu.
Et il faudra toutes ces narrations, que nos auditeurs restés
en bas trouveront bien différentes et parfois opposées,
il les faudra toutes pour donner une image, un peu fanée déjà,
mais tout de même enviable, de ce que nous avons aperçu
et dont nous sommes témoins. Ils sont nombreux,
les hommes qui cherchent. Tous cherchent. Et le résultat est
une vérité morcelée. La réalité de
la structure de lunivers que dévisagent les chercheurs,
et la réalité plus profonde de ce qui sous-tend cette
structure et que cherchent à approcher les théologiens
et les philosophes, cette réalité est désormais
perçue par des milliards de regards. Même le système
de création que les révélations religieuses tentent
de comprendre et dexpliquer, est trop vaste pour pouvoir être
saisi par leur seul regard. Même la religion chrétienne,
bien quagrégée autour du Fils du Père, est
trop courte. Repliée sur elle seule, elle est myope, irrémédiablement
si elle prétend tout avoir vu. Elle aussi, comme nimporte
laquelle de ses surs, même à la limite celles qui
sembleraient la nier, elle aussi a besoin de connaître la part
de vision que chacune porte dans sa contemplation. Pour elle, il nest
pas jusquà ceux qui se disent athées, dont elle
nait quelque chose à apprendre. Deux conditions,
donc, pour que ces rencontres soient efficaces : que toutes les religions
se rencontrent, et que la rencontre se fasse autour du Christ pour que
la Vérité morcelée prenne son sens. Inévitablement,
si les religions se regardent, elles tomberont daccord sur la
présence en elles toutes, du Christ. Redisons encore que le Christ
nest pas la possession des chrétiens ni de qui que ce soit.
Il est le Fils du Père, seul Pont entre nous et Dieu. Seul ciment
du monde qui se fait. Seul, surtout, à voir face à face
Celui qui a voulu nous donner la vie, et que, tous, nous cherchons.
Mais, comme chacun possède, même sil ne le sait pas,
un angle du visage et de la personnalité du Christ, le travail
seul urgent désormais, dans ce XXIème siècle, est
de rapprocher ces vues jusquà ne plus voir quun seul
visage. On peut être assuré que cette convergence et cette
communion dans la contemplation de lunique visage visible de Dieu,
doit advenir dans lhistoire. Peut-être sera-t-elle lultime
moment de la construction du Cosmos ? En tout cas, cest à
cette rencontre que nous travaillons tous, souvent sans le savoir. Longtemps, on a dit que la science navait rien à dire sur la métaphysique qui, par définition habituelle signifiait justement ce qui dépassait le domaine du physique, son domaine propre ; que seules les religions pouvaient bien parler du Mystère absolu quest Dieu. Cela fut peut-être vrai, un temps. Mais ce temps nest plus le nôtre. La Source de lexistence est unique, elle couvre à la fois le domaine matériel et mesurable, et le domaine immatériel pour lequel nos mesures techniques se jugeaient inadaptées. Aujourdhui, sans remettre en question loriginalité de chaque science humaine, il faut dire à chacune quelle a sa place dans la recherche de la Source. Et que chaque science qui ferait défaut dans cette quête retarderait le moment de la « palpation » du visage de Dieu. Et donc, retarderait la venue de la paix. Et de la justice. Toutes les forces spirituelles, intellectuelles, matérielles, toutes les bonnes volontés, sont désormais acculées sans appel à recentrer leur recherche et leurs expérimentations vers la Source. Beaucoup, sans doute ne lappelleront pas Dieu. Chacun est libre de donner le nom quil juge le meilleur à ce quil cherche. Lessentiel est de chercher avec tous les moyens et avec toute la passion intelligente dont chacun dispose. Lcuménisme, désormais, nest plus réservé aux religions. Il est le nom de leffort auquel tous les hommes sont prêts et qui est en train de couronner la longue quête de lunivers humain, lancée dès que Dieu dit : « Que la lumière soit ! » « Que tous soient un, pour que le monde croie. » Tous. Pas « tous les chrétiens », pas « tous les adeptes dune religion ». Tous. Au sens absolu, devant lequel notre ancienne logique doit céder. Les Chrétiens seront peut-être les seuls à se souvenir de cette autre parole du Christ : « Nul ne va au Père sans passer par moi. » Seuls ils pourront donner le nom de Christ à la voie quils cherchent. Mais peu importe. Tous ceux qui cherchent sont sur cette voie. Quils y avancent. Cest en avançant quils sauront la nommer.
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